Connaissez vous le mythe de la motivation ? Comme tout mythe, il comporte sa part de réalité (le sommet de l’iceberg), et surtout beaucoup de fantasme (la partie cachée du glaçon).
La motivation est souvent perçue comme une force indestructible qui permet de réaliser toutes les tâches avec ardeur et une énergie qui ne tarit jamais. Le problème avec cette motivation, c’est qu’on ne la trouve jamais. Et pour cause : elle n’existe pas réellement.
Je te propose ici de poser un autre regard sur ce qui pousse un être humain à agir, pour comprendre comment dans ton quotidien, tu peux être plus apte à passer à l’action au bon moment.
La théorie de l’autodétermination
D’après la théorie de l’autodétermination (Deci et Ryan, 2002), il existe trois principaux types de motivation qui poussent un être humain à l’action : la motivation interne (ou intrinsèque), la motivation externe (ou extrinsèque) et l’amotivation (absence de motivation).
🏅 Motivation intrinsèque
La motivation intrinsèque correspond à un engagement volontaire et spontané dans une activité, sans attente de récompense externe si ce n’est le plaisir procuré par cette activité. Par exemple, un passionné de musique pourra passer des heures avec son instrument à s’entrainer, sans ressentir le besoin de s’arrêter.
La motivation interne, c’est ce mouvement interne qui nous pousse et qui nous permet de rester de nombreuses heures concentrés, sans que notre esprit vagabonde, sans avoir besoin de faire une pause.
Sauf si vous avez déjà trouvé votre idéal de vie, cet état de motivation interne est probablement loin de votre manière d’être au quotidien. Et ça n’est pas grave du tout, nous y reviendrons un peu plus bas.
💵 La motivation extrinsèque
La motivation extrinsèque correspond à un engagement dans une activité ou une tâche non pas en raison de cette tâche en elle-même mais pour des motifs externes, qu’ils soient des externalités positives ou négatives.
La quasi-totalité des actions que nous entreprenons au quotidien sont guidées par une motivation externe : elles sont régies par nos interactions avec notre environnement et nos proches, dans une attente de récompense, par contrainte ou pour éviter une conséquence.
Qu’il s’agisse d’aller travailler chaque jour – gagner de l’argent – , des interactions sociales que nous entretenons – répondre aux normes sociétales – , du fait de faire le ménage et la lessive – vivre dans un environnement sain – ou même de partir en vacances – trouver un instant de détente -, nous agissons en permanence par mécanisme d’anticipation et de projection.
En effet, ça n’est pas l’action en elle-même que nous recherchons, mais ce qu’elle nous apporte directement ou indirectement.
😴 L’absence de motivation
La troisième niveau de motivation défini par Deci et Ryan est celui de l’amotivation, c’est à dire l’absence totale d’énergie et d’élan pour passer à l’action. Ce niveau se rapproche d’un état dépressif dans lequel même la contrainte extérieure n’est pas suffisante.
Les personnes bloquées dans cet état ont tendance à attendre le tout dernier moment pour agir, quitte à bâcler un travail ou à ne pas vouloir faire face aux conséquences de leur inaction.
Je ne détaillerai pas ici le problème de l’absence de motivation, qui relève peut-être d’un aspect thérapeutique et demanderai un article à part entière. Ce sera l’objet d’une publication ultérieure.
Ce que l’on ne dit pas à propos de la motivation
OK, maintenant que nous avons posés les bases d’une compréhension de la motivation, il est temps d’aborder la partie cachée de l’iceberg : ce qui n’est pas dit à propos de la motivation et les limites du modèle de l’autodétermination.
🕵️ Le mythe de la motivation inatteignable
La motivation intrinsèque est un état fantasmé, qui relève d’un idéal à atteindre et qui n’est accessible que … dans certaines conditions idéales.
Le problème fondamental ici est que l’humain -en tout cas dans la société actuelle – est construit sur un modèle de développement qui ne permet pas l’existence de cette motivation intrinsèque. L’environnement social, éducatif et scolaire dans lequel nous grandissons favorise la contrainte et la compétition et enterre très tôt toute possibilité d’accéder à cette motivation interne.
Aussi, démunis de connaissances et d’outils pour créer les conditions nécessaires à cette motivation interne, mais inspirés par l’exemple des autres – ceux qui réussissent et qui renvoie l’image d’une motivation idéale – de nombreuses personnes se retrouvent coincés dans un état d’impuissance ressentie.
Accablés par leur propres échecs à trouver ce saint Graal, cet état d’impuissance peut dégénérer jusqu’à une absence totale de motivation, et un état d’impuissance admise comme la seule réalité possible.
📈 La motivation se crée et s’entretient au quotidien
Malgré ce constat alarmant, il existe une bonne nouvelle : votre motivation n’a pas disparue, elle existe belle et bien dans votre intériorité. En voici la preuve : lorsqu’il s’agit d’aller regarder des vidéos sur Youtube, ou d’aller manger au restaurant, votre résistance à l’action est sans doute proche de zéro.
Vous êtes capables de vous motiver et d’agir, seulement les facteurs et l’orientation de cette motivation vous sont inconscients, et donc votre esprit s’égare vers ce qui est pour lui le plus séduisant. Et remplir des papiers administratif ou déposer des CV pour trouver un travail n’est pas ce qui est le plus attrayant.
La motivation n’est pas un mécanisme binaire qui est activé ou n’est pas activé. C’est un mécanisme biologique complexe qui s’entretient au quotidien, composés de facteurs qui la nourrissent et d’autres qui la limitent.
Le terreau de la motivation
🌱 Motivation et besoins profonds
Un des principaux moteurs de nos comportements sont nos besoins profonds. L’ensemble de nos actions sont toujours guidés par des besoins internes.
Nos besoins sont des forces internes, des nécessités ressenties qui nous poussent à agir de telle ou telle manière. L’existence d’un besoin va générer une production d’énergie interne, appelé état de tension, qui se transforme en motivation.
Chaque personne possède en fonction de son vécu, de son histoire et de sa famille, une configurations de besoins différents. Pour ceux qui souhaitent aller plus en profondeur sur le concept de besoin, j’en parle plus en détail ici.
Il est important de prendre en compte nos besoins réels si l’on souhaite être capable de créer et d’entretenir une réelle motivation sur le long terme.
Un environnement de travail qui ne garantit par le respect de nos besoins ne sera pas propice à la mise en place d’une motivation intrinsèque. En effet, notre énergie sera tournée vers la sécurité interne plutôt que vers l’objet de notre travail.
Si par exemple au bureau, vous ressentez une compétition et un jugement profond entre vos collègues alors que votre besoin profond est focalisé sur l’entraide, il vous sera très difficile de trouver la motivation à réaliser les tâches demandées. Vous serez en sur-adaptation à chaque instant.
🧒 Curiosité et plaisir d’apprendre
L’humain est un explorateur né. Biologiquement, votre cerveau est conçu pour apprécier la nouveauté. En effet, pour survivre durant notre processus d’évolution en tant qu’espèce, nous avons fait de la créativité et de la curiosité notre premier mécanisme de survie.
Les enfants nous montrent un bel exemple de ce phénomène : ils sont naturellement curieux de tout, prêts à engager une énergie incroyable pour découvrir le monde et apprendre. Ils se réjouissent de tout ce qui est nouveau. Ils transforment tout en jeu.
Comment retrouver sa curiosité de l’enfance ? Créez du ludique et de la nouveauté dans vos actions du quotidien, votre cerveau va adorer. Évitez la routine et les habitudes qui vous enferment dans le cercle du connu et réduisent progressivement votre énergie à agir.
Ré-apprenez à vous émerveiller (voir un autre article à ce sujet), à regarder le monde depuis votre regard d’enfant, comme si tout était neuf.
🤷 Le « pourquoi » et le « comment »
Un autre facteur majeur de la motivation interne est celui que j’appelle du « pourquoi » et du « comment ».
L’être humain n’est pas capable de ressentir une énergie à l’action pour ce qui n’a pas de sens pour lui ni pour ce qu’il ne se sent pas en capacité de réaliser.
Je vous donne un exemple concret : si je vous demandais d’évaluer sur 10 votre motivation à repeindre la maison de votre voisin. Elle serait probablement proche de zéro, car à moins d’être payé pour le faire, cela n’a pas de sens pour vous.
Second exemple : si je vous proposais de repeindre la maison de votre voisin avec une brosse à dent, quelle serait votre niveau de motivation ? Probablement proche de zéro, devant la complexité de la tâche à réaliser.
Aussi simple que soit ce mécanisme, ses conséquences en sont essentielles : si ce que vous tentez de réaliser n’a pas de sens direct pour vous, vous n’aurez aucune motivation à l’action. La profondeur du « sens » sera directement proportionnelle à l’intensité de l’énergie à agir.
De la même manière, si vous ne vous sentez pas en mesure de réaliser quelque chose, vous n’aurez aucune motivation. Cela nous ramène directement la question de la confiance en soi et l’estime de soi. Les personnes n’ayant pas réussi à construire une confiance en eux suffisante auront de nombreux problèmes de motivation au quotidien (je parle de la confiance en soi ici).
❌ La contrainte et la menace diminuent la motivation interne
Notre système éducatif est basé sur le principe de notes et d’évaluations. Une « bonne » note nous apporte un retour positif de nos parents et professeurs. L’inverse est malheureusement vrai : une « mauvaise » note et nous sommes pointés du doigt, nous faisant ressentir cette expérience comme un échec.
Aussi nous associons très rapidement la réussite et l’apprentissage à une contrainte, et non plus un plaisir. Cette manière de fonctionner se retrouve également dans nos environnements de travail, ou nous sommes évalués en fonctions de nos résultats et de nos performances.
Or, des études ont démontrés à de nombreuses reprises que la contrainte et la peur de l’échec diminuent de manière très significative la motivation interne et l’énergie à l’action : dès que la contrainte n’est plus là, la motivation redescend en flèche.
Conclusion : comment gérer sa motivation au quotidien :
Derrière le mythe de la motivation se cache une réalité biologique beaucoup plus complexe qui mériterait d’être partagée au plus grand nombre. La motivation idéale n’existe pas, elle se crée et se cultive avec beaucoup de patience et de bienveillance envers soi-même.
Pour créer au quotidien votre motivation, voilà quelques pistes à explorer :
- Mettre en place des habitudes de travail ludiques et diversifiées
- Créer une routine matinale inspirante pour se mettre en énergie
- Cultiver la bienveillance et ne pas se juger de ne pas réussir
- Travailler sur sa confiance en soi pour se sentir capable de réussir
- S’émerveiller de ses petites réussites et se récompenser régulièrement
Bonne expérimentation sur les chemins de la motivation 😉
Axel Neuveglise